Chômeurs lésés : le médiateur de Pôle emploi prend à partie le gouvernement

Depuis les révélations de Mediapart sur un « effet de bord » de la réforme de l’assurance-chômage, plusieurs dossiers d’allocataires pénalisés ont connu une issue favorable. Le médiateur national de Pôle emploi, qui avait alerté dès le début, est furieux contre le ministère du travail.

La charge est sévère et le propos pour le moins salé. Jean-Louis Walter, médiateur national de Pôle emploi, a confié à Mediapart son exaspération et s’en prend, sans ambages, au ministère du travail, tenu responsable d’un « effet de bord » généré par la réforme de l’assurance-chômage.

Il s’agit d’une règle censée être protectrice mais qui se retourne contre certains demandeurs et demandeuses d’emploi, qui voient injustement leur allocation chômage baisser, parfois de plusieurs centaines d’euros par mois, selon les témoignages recueillis.

Annexée à la réforme, entrée en vigueur le 1er octobre 2021, la mesure entend compenser 11 mois de confinements et couvre-feux en 2020 et 2021, en allongeant automatiquement la « période d’affiliation » de toutes les nouvelles et nouveaux inscrits.

Pour le dire plus simplement, Pôle emploi va chercher encore plus loin dans le passé professionnel des emplois et salaires pour compenser l’éventuelle inactivité de ces 11 mois. Or, ce mécanisme pénalise des personnes non concernées par les confinements et qui gagnaient moins bien leur vie dans le passé.

« Quand les bonnes intentions conduisent à une aberration ! », commente, acerbe, Jean-Louis Walter, dénonçant une forme d’amateurisme du ministère du travail. « Ce texte a été élaboré par des jeunes sans expérience sur la réglementation de l’assurance-chômage. Ils ne savent pas faire, ils ne savent rien mais ils considèrent qu’ils savent tout, qu’ils connaissent tout ! Et ils sortent des conneries et des aberrations ! »

Jean-Louis Walter y voit la conséquence de la reprise en main, par l’État et par décret, des nouvelles règles, après l’échec des négociations avec les partenaires sociaux en 2019. « Tout ceci a été mené de façon technocratique et ça ne peut que complexifier les règles, déjà complexes. »

« Avec Madame Borne, on est dans une forme de rigidité qu’on n’a jamais vue. »

Jean-Louis Walter, médiateur national de Pôle emploi

Lui-même a participé à des négociations sur les conventions d’assurance-chômage dans les années 1990 et déplore « un impératif, omniprésent aujourd’hui, celui de faire des économies ». Le médiateur national détaille : « Avant, on regardait la corrélation assurance-chômage-monde du travail dans l’intérêt de tous, chômeurs et employeurs. Maintenant, le seul intérêt est financier. »

Indépendant, le médiateur national publie chaque année des rapports éclairants, et sans concession, sur le fonctionnement de Pôle emploi. Sa parole publique est assez rare. Aujourd’hui, et c’est le moins que l’on puisse dire, il est très remonté.

Il apprécie moyennement que le ministère du travail ait reconnu, auprès de Mediapart, que cet « effet de bord » était bien identifié en amont, renvoyant alors la patate chaude aux médiatrices et médiateurs, pour faire du « cas par cas ».

« Ce n’est pas la ministre qui décide si je dois faire une médiation. Elle n’a rien à dire, elle n’a rien à décider », commente sèchement Jean-Louis Walter. Avant d’ajouter : « Avec Madame Borne, on est dans une forme de rigidité qu’on n’a jamais vue. »

Le médiateur dit avoir alerté la direction de Pôle emploi, dès novembre 2021, sur les problématiques liées à cette mesure censée protéger les chômeuses et les chômeurs. « Les saisines sur le sujet ont commencé à ce moment-là et, depuis, elles montent progressivement en charge. Le volume n’est pas énorme mais il n’est pas neutre », explique-t-il.

Jean-Louis Walter dit avoir fait une préconisation dès la fin de l’année 2021, en suggérant d’instaurer « un droit d’option » pour les demandeuses et demandeurs d’emploi, dès leur inscription. L’idée : expliquer clairement les enjeux et les impacts sur les allocations de cette fameuse période d’affiliation rallongée. « Le refus a été catégorique et sans motif », s’agace-t-il.

 

« En cas de médiation, on se retrouve à traiter trois fois la demande d’allocation ! » Un agent de Pôle emploi, spécialisé en indemnisation

Pôle emploi appliquait donc la règle pour tout le monde, sans distinction et sans prendre en compte les injustices. Et pouvait refuser les médiations. « Il faut bien comprendre que le médiateur ne décide pas, c’est important de le dire, insiste Jean-Louis Walter. En cas de saisine, nous demandons des éléments à Pôle emploi sur le dossier puis nous émettons une préconisation. Mais c’est Pôle emploi qui décide de la suivre, ou non. »

La publication de l’article dans Mediapart a visiblement changé le cours des choses. « Ils ont vu que ça ne pouvait plus tenir et ont lâché du lest », sourit Jean-Louis Walter. Trois des quatre personnes ayant témoigné en janvier 2022 ont ainsi vu leur situation se débloquer très rapidement. Toutes avaient pourtant été déboutées en premier recours. Une quatrième attend toujours des nouvelles.

Par ailleurs, selon des mails internes que nous avons pu consulter, Pôle emploi a communiqué à ses agent·es la procédure à suivre « en cas de médiation » après un « calcul des droits défavorable ». Il s’agit de fournir à la médiatrice ou au médiateur le montant de l’allocation avec et sans la période allongée. Mais il n’est toujours pas question d’en informer au préalable l’ensemble des demandeuses et demandeurs d’emploi, dont une partie ignore sans doute être lésée.

« Si on le faisait d’emblée, ce serait plus cohérent ! », explique un conseiller de Pôle emploi, spécialisé dans les questions d’indemnisation. Il dénonce une « situation ubuesque » et une charge de travail supplémentaire.

« En cas de médiation, on se retrouve à traiter trois fois la demande d’allocation ! Une première fois, au moment de l’inscription. Une seconde, à la demande du médiateur et une troisième fois si Pôle emploi suit la préconisation ! Par ailleurs, faire une comparaison entre les deux périodes nécessite une procédure de contournement du système informatique. Ça demande du temps. C’est vraiment du grand amateurisme de la part du gouvernement, qui veut voir la règle appliquée systématiquement. Ils n’ont aucune idée de la manière dont ça se passe dans la réalité ! »

D’après lui, cela ouvre aussi la porte à des inégalités de traitement. « On va se retrouver avec des décisions différentes, selon la seule position de Pôle emploi en médiation. » Le cas d’Isabelle* lui donne d’ailleurs raison. Elle est concernée par cet effet de bord et perd, selon ses calculs, près de 300 euros par mois.

Elle a reçu, ce lundi 7 février, une fin de non-recevoir à sa demande de médiation. Ayant d’abord saisi le médiateur régional, comme le veut la procédure, elle vient d’écrire, en dernier recours, au médiateur national.

Source: Médiapart

Malaise chez les agents de Pôle emploi, chargés d’appliquer une réforme « violente, injuste et inexplicable »

L’application de la réforme de l’assurance chômage s’annonce rude pour les demandeurs d’emploi. Elle l’est également pour les agents de Pôle emploi, qui s’interrogent sur le sens de leur métier et l’opacité du mode de calcul de l’indemnisation.

Alors que les vœux de nouvelle année emplissent les boîtes mails des quelque 54 500 agents de Pôle emploi, l’année 2022 ne s’annonce pas réjouissante pour nombre d’entre eux. C’est même le contraire. La réforme de l’assurance chômage, reportée puis finalement mise en place en fin d’année dernière, ajoute un poids sur les bras d’agents déjà au bout du rouleau.

Pour lire la suite de l’article Basta média, cliquer sur le lien suivant:

https://basta.media/Pole-emploi-reforme-assurance-chomage-nouveau-mode-de-calcul-conseiller-indemnisation

Les enjeux du financement de la sécurité sociale

Voilà depuis plus de 75 ans que la CGT s’est engagée dans la lutte pour la création de la Sécurité sociale, plus de 75 ans que la CGT se mobilise pour défendre l’une des conquêtes majeures du monde du travail, loi humaine et de progrès à l’initiative d’Amboise CROIZAT, Ministre des travailleurs et bâtisseur de ce système moderne, solidaire et démocratique.

La Sécurité sociale a aujourd’hui 75 ans et pourtant nombreux sont ceux qui pensent
qu’elle a toujours existé et qu’elle existera toujours tant elle fait partie intégrante du quotidien de chacun.
Dès l’origine, le patronat, le capital et les gouvernements successifs n’ont eu de cesse de porter des attaques à chacun de ces principes, causant une régression de l’ensemble des secteurs de la protection sociale. Extrait de citations d’un article de Denis Kessler (alors N°2 du Medef) dans la revue « Challenges » le 4 octobre 2007 :
« Le modèle social français est le pur produit du Conseil national de la Résistance. Il est grand temps de le réformer, et le gouvernement s’y emploie… » « Il s’agit aujourd’hui de sortir de 1945, et de défaire méthodiquement le programme du
Conseil national de la Résistance ! ».

Force est de constater que depuis plusieurs décennies, les principes fondamentaux que
sont l’universalité, la solidarité et la non étatisation sont battus en brèche aux dépens de l’ensemble du monde du travail. L’étatisation de l’administration de la Sécurité sociale a été opérée pour mettre en oeuvre la doctrine du financement « à ressources constantes ». En d’autres termes, en dépit de l’augmentation de la population, il s’agit de stabiliser la part du PIB consacrée au financement de la Sécurité sociale.

Un acte décisif dans l’étatisation de l’administration de la Sécurité sociale a été la réforme constitutionnelle de 1996, menée par le gouvernement Juppé pour imposer les
lois de financement de la Sécurité sociale dont le principe premier est l’ajustement des
dépenses aux recettes : en soi un véritable contresens, car un tel ajustement, strictement appliqué, amène à répercuter les effets des crises économiques sur les prestations, à rebours de l’objectif même de la Sécurité sociale : « garantir les travailleurs et leurs familles contre les risques de toute nature susceptibles de réduire ou de supprimer leur capacité de gain, à couvrir les charges de maternité et les charges de famille qu’ils supportent » (Ordonnance du 4 octobre 1945).

Cette étatisation de la Sécurité sociale a permis aux gouvernements successifs de
mener des politiques d’exonérations massives de cotisations dites patronales. L’étatisation a ainsi remis en cause l’universalité des garanties…

Pour lire l’article complet, cliquer ici

 

Réforme de l’Assurance chômage : le décret de la honte !

Mépris gouvernemental à tous les étages !

Le décret de la honte est donc paru dans la nuit du 30 septembre, en catimini, actant la modification du mode de calcul de l’allocation chômage. Fondée sur des présupposés faux, elle va renforcer la précarité des demandeurs d’emploi.

Revenons un peu sur ce qui officiellement fonde cette contre-réforme : l’idée qu’un demandeur d’emploi serait un privilégié, un dilettante qui par choix refuse les dizaines d’emplois de qualité et bien rémunérés qui s’offrent à lui chaque jour. A un moment il va falloir arrêter avec celle fable réactionnaire et ces mensonges en pagaille.

La réalité c’est que 40% des chômeurs ne perçoivent absolument rien, parce qu’ils n’ont tout simplement plus droit aux allocations chômages, et 42% sont sous le seuil des 500€ mensuels. Sur l’ensemble des chômeurs, 63% gagnent moins de 1000€. Donc nettement moins que le salaire minimum. On est quand même très loin de chiffres qui font rêver.

Histoire de remettre un peu les choses en perspective la richesse des milliardaires a augmenté de 40% cette seule année (170 milliards d’euros) Les profiteurs de la crise ne se posent pas la question des fins de mois difficiles. Le CAC40 observe une année record mais le gouvernement s’obstine à faire payer la crise aux précaires !

Aquoi rime donc cette mesure abjecte alors que des millions de personnes sont privées d’emploi ? Un attachement idéologique aux idées les plus rétrogrades, une vision méprisante et culpabilisante de ceux qui pour toute fin ne font que percevoir des revenus de remplacement parce qu’ils ont cotisé pour cela, un signe envoyé à Bruxelles qui décidément n’en aura jamais fini d’imposer la seule et unique recette qu’elle connait pour écraser les populations : L’austérité !

Cela va générer des situations de détresses créées par des effets broyeurs d’une contre-réforme inutile qui plus sur le plan économique. La réforme la plus dure du quinquennat va être un véritable carnage social.

En quoi consiste concrètement cette mesure ?

Jusqu’ici, l’allocation était calculée à partir de la moyenne des salaires des 12 derniers mois, divisée par le nombre de jours travaillés. Désormais, elle sera calculée sur les 24 derniers, et le revenu sera divisé par le nombre de jours total, jours non travaillés inclus. En faisant ici un simple produit en croix tout le monde comprendra que le compte n’est plus bon.

De plus, Il faudra désormais avoir travaillé 6 mois pour pouvoir recharger ses droits, et non plus 4 mois comme actuellement.

Conséquence : Avec cette décision inique, des centaines de milliers de personnes déjà précarisées vont basculer dans la grande pauvreté. Selon l’UNEDIC 41% des allocataires de l’assurance-chômage vont perdre en moyenne 13% de leurs revenus dans l’année à venir. Ce qui est énorme quand on a un revenu aussi faible !

– MÉPRIS envers le Conseil d’Etat qui doit encore statuer sur le fond suite au recours victorieux en référé des organisations syndicales le 22 juin 2021

– MÉPRIS envers les organisations syndicales en les privant volontairement de tout délai pour agir à nouveau en justice, alors que toutes sont opposées à la réforme

– Et surtout MÉPRIS envers les demandeurs d’emplois et le monde du travail en général avec cette réforme qui va les contraindre de payer le prix de la crise. Ces allocations de chômage sont des droits acquis ! Acquis par le travail socle de notre protection sociale.

C’est un coup supplémentaire porté à notre modèle universel et solidaire qu’est notre protection sociale !

A tous les précaires, demandeurs d’emplois, jeunes, salariés, retraités : manifestons le Mardi 5 octobre 2021

Pour accéder en vidéo à la démonstration brillante et magistrale de Clément Viktorovitch (France Info) sur la réforme de l’assurance chômage, cliquer ici

Le médiateur de Pôle emploi délivre un rapport teinté de colère

Sanctions « disproportionnées », réglementation complexe et piégeuse, courriers incohérents : les demandes de médiation ont augmenté en 2020, marquée par la crise. Et l’exaspération s’amplifie.

Avis de tempête. Dès l’avant-propos de son rapport, Jean-Louis Walter prévient : la colère gronde. Le médiateur national de Pôle emploi pose d’emblée le
contexte: une crise sanitaire sans précédent et une réforme d’assurance-chômage imminente. Cocktail explosif.

« Ce rapport, peut-être plus que les précédents, vous donne à lire ces messages d’incompréhension et de colère qui nous parviennent dans les courriers et les
mails, indique-t-il. Nous sentons bien que la Covid19 a impacté la cohésion sociale, elle suscite inquiétude, angoisse et parfois même de grandes colères. Pendant
ce temps, des réformes (toujours anxiogènes) sont annoncées, mal expliquées elles peuvent apparaître comme des sanctions supplémentaires à celles et ceux
qui sont déjà en grande difficulté.»
Au paragraphe suivant, il enfonce le clou et s’adresse, sans les nommer, aux initiateurs de la réforme: Plus que jamais, nous percevons ces inquiétudes croissantes et surtout l’incompréhension face à des évolutions dont les auteurs ne semblent pas toujours mesurer les répercussions.»

Cela fait maintenant plus de dix ans que Jean-Louis Walter officie en tant que médiateur national de Pôle emploi. Sa fonction a été créée par la loi du
1er août 2008. Il dispose «de tous les moyens d’un fonctionnement indépendant, distinct des services de Pôle emploi».
Ses rapports annuels, présentés en conseil d’administration de Pôle emploi, sont éclairants et sans concession. Ce sont de véritables baromètres des problématiques fréquemment rencontrées par les demandeurs d’emploi. Jean-Louis Walter condense
les motifs de saisine de ses services, alerte sur des dysfonctionnements au sein de Pôle emploi et formule des recommandations.
En 2020, le nombre de demandes de médiation a augmenté de 12%. 34685saisines contre 30986 en 2019 (elles étaient à l’époque en baisse de 2 points après une hausse de 3,6% en 2018). L’essentiel des demandes porte sur l’indemnisation (57%) puis sur les trop-perçus (16%) et la formation (8%).

Sanctions disproportionnées et courriers incohérents.
Les radiations de Pôle emploi représentent 5% des saisines. Le médiateur fait pourtant le choix de s’y arrêter dans un chapitre pointant «la gradation et la sévérité des sanctions». Être radié de Pôle emploi signifie ne plus percevoir d’allocation-chômage, le
temps de la sanction. La personne privée de droits est d’ailleurs désinscrite des listes des demandeurs d’emploi.
La durée de la radiation dépend du «manquement» constaté. La loi sur «l’avenir professionnel» avait modifié, et durci, l’échelle des sanctions (voir ici
l’article de Mathilde Goanec). Les durées varient de un à douze mois consécutifs. Les allocations peuvent même être définitivement supprimées en cas «de fausse déclaration en vue de percevoir des allocations».

Au début de la crise, en 2020, les radiations avaient été suspendues. Une bienveillance très provisoire, uniquement le temps du premier confinement.
En moyenne, au cours d’une année «normale», 43000personnes sont radiées chaque mois (données mensuelles2019 de la Dares).
Dans son rapport, le médiateur national note que «nombreux sont les médiateurs [régionaux] qui constatent que ces sanctions deviennent de plus en plus sévères, avec un usage fréquent des radiations de six mois et, surtout, suppression définitive du revenu de remplacement».
À ce sujet, il rappelle que «le Conseil d’État reconnaît le caractère de sanction aux suppressions du revenu de remplacement et précise que cette qualification
s’assortit d’un principe de proportionnalité». Or, souligne Jean-Louis Walter, «au regard des situations présentées, certaines d’entre elles semblent disproportionnées, dans la gravité de la sanction et de leurs conséquences». Et il ajoute: «À l’évidence,
ces situations prennent une acuité particulière dans le contexte de crise sanitaire, lorsque la personne radiée ne peut plus rechercher d’emploi.»

Pour étayer son propos, le médiateur raconte l’histoire, terrible, de «MonsieurO.E.», 57ans et ouvrier agricole. Cet homme est «déconnecté du monde Internet et
ne dispose pas d’ordinateur». Il comptait sur ses employeurs en qui il avait « une confiance aveugle » pour procéder à ses déclarations mensuelles. Mais certains ne l’ont pas fait. Monsieur O.E. a donc «fait l’objet d’une sanction pour fausse déclaration
entraînant sa radiation pour une durée de 6 mois, ainsi que la suppression définitive du reliquat de 666 jours restants sur ses allocations de chômage. Un trop versé
d’un montant de 3772,70euros lui est par ailleurs réclamé suite à l’exercice d’une activité non déclarée, à son insu».
Une triple et très lourde peine. «La personne se retrouve ainsi sans aucun revenu pendant la durée de la sanction, puis avec un ou plusieurs indus à
rembourser à sa réinscription comme demandeur d’emploi», décrit Jean-Louis Walter.
Le médiateur dit avoir adressé, sur ce sujet, une note à la ministre du travail. Il plaide pour une «adaptation de la décision à la spécificité de chaque situation
individuelle». Un traitement sur mesure, en somme, plutôt qu’une application stricte et aveugle des règles.
Il invite également Pôle emploi à une gestion plus personnalisée de certains dossiers. En particulier si c’est l’opérateur qui commet une erreur. Il cite un cas
de «maltraitance autour d’une radiation».
Monsieur A., sanctionné pour absence à un entretien… auquel il a pourtant assisté. Son agence avait reconnu son erreur mais Monsieur A. a dû «écrire un courrier
de contestation, pour traiter sa situation selon le circuit habituel, presque deux mois après les faits». «Est-il normal de demander à une personne de contester dès lors qu’il y a reconnaissance d’un tort créé par Pôle emploi? N’y a-t-il pas un moyen rapide de résoudre la situation plutôt que devoir en passer par un circuit habituel?», interroge Jean-Louis Walter.
Le médiateur préconise enfin à Pôle emploi d’améliorer le contenu de ses courriers envoyés aux chômeurs. Cette question est d’ailleurs selon lui «un
serpent de mer». S’il concède des efforts, il estime que la tâche est encore «immense».
« Les courriers liés aux radiations sont sensibles car la sanction qu’ils portent leur impose un formalisme particulier. Malheureusement, ils restent parfois porteurs d’incohérences. Compte tenu de la sévérité des sanctions appliquées, ces approximations sont mal venues et potentiellement risquées juridiquement.»

Activité réduite et méconnaissance des règles : gare aux pièges
Chaque mois, plus de deux millions de personnes travaillent, tout en étant inscrites à Pôle emploi. Cela s’appelle l’activité réduite. En fonction du salaire perçu, il est parfois possible de cumuler son revenu avec une partie de son allocation-chômage.
Loin d’être un phénomène à la marge, l’activité réduite peut, selon le médiateur, pénaliser les demandeurs d’emploi qui ne maîtrisent pas bien les règles.
Trop-perçu, non-déclaration d’activité (en l’absence d’indemnisation, donc sans volonté de fraude) ou demande de réexamen des droits après une période de
travail sont autant de pièges dans lesquels ils peuvent tomber.
« Être inscrit [à Pôle emploi] et travailler ne font pas toujours bon ménage, analyse Jean-Louis Walter. Ces personnes ne peuvent pas savoir dans quel contexte
d’examen [de leurs droits] elles se trouvent. Elles ne peuvent pas connaître une réglementation que les conseillers eux-mêmes ne maîtrisent pas toujours
parfaitement, compte tenu de sa complexité.»
Le médiateur cite aussi l’exemple de celles et ceux qui ne perçoivent pas d’allocation-chômage mais préfèrent rester inscrit.e.s à Pôle emploi, le temps de terminer une mission. «À force d’alterner périodes de travail et périodes de chômage, il est pour eux
plus simple et peut-être aussi plus rassurant de rester inscrits […] plutôt que de se désinscrire pour se réinscrire en permanence.»
« S’il est aisé à comprendre, ce choix n’est pas neutre au regard de la réglementation d’assurance-chômage, avertit le médiateur. Il dresse un cadre contraignant,
qui se referme impitoyablement sur ceux qui n’en ont pas une parfaite connaissance et maîtrise. Car ouvrir un nouveau droit, déclarer des périodes de travail
ou interrompre une période d’essai requièrent une grande vigilance, sous peine d’être désavantagé, voire sanctionné.»

Ouvrir des droits après une démission: la désillusion
C’était une promesse phare d’Emmanuel Macron, candidat en 2017 pour la présidentielle. C’est aujourd’hui un véritable flop. L’ouverture des droits
eu l’effet escompté. «Sa mise en oeuvre pratique est éloignée de la simplicité de la promesse initiale, car elle s’assortit de conditions préalables assez
complexes», décrit le médiateur. Dans son programme, le candidat Macron écrivait
ceci: «Nous ouvrirons les droits à  l’assurance chômage aux salariés qui démissionnent […]Tous les cinq ans, chacun y aura droit, s’il choisit de démissionner pour changer d’activité ou développer son propre projet professionnel.»
En réalité, une fois transformée en loi, cette promesse s’est vidée de sa substance. Les conditions sont effectivement très strictes. Il faut justifier d’une durée
d’activité salariée continue de 5ans, disposer d’un projet de reconversion «réel et sérieux», solliciter un conseil en évolution professionnelle et faire valider le
projet par une commission régionale.
Le gouvernement espérait de 1 500 à 2 500 bénéficiaires par mois. Ils ont à peine été…
un millier entre le 1ernovembre 2019 (la mise en application) et fin mars 2020, selon une note de synthèse de l’Unédic, publiée en juillet 2020.
Le gestionnaire de l’assurance-chômage estimait à l’époque que «la période de confinement et la récession économique» freineraient sans doute encore
davantage la montée en charge de cette mesure. Pire, la promesse a généré de terribles désillusions, pointées par le médiateur: «Bon nombre de candidats
à ce nouveau droit découvrent, à la fin d’un parcours fastidieux, qu’ils ne sont pas éligibles au dispositif, alors qu’ils ont déjà démissionné.»
Sa préconisation est limpide: «L’esprit de ce nouveau droit semble être dévoyé par une procédure trop complexe. Les candidats à la reconversion professionnelle devraient avoir les moyens de prendre leurs décisions de manière éclairée, en les informant avant qu’ils démissionnent de leur emploi, des conditions de prise en charge financière de leur projet. Il est urgent de mener une réflexion sur l’articulation
des interventions des différents acteurs qui gèrent ce dispositif.»
Pour mémoire, cette promesse d’une «assurance chômage pour tous» était présentée comme le volet «justice sociale» de la réforme. D’un côté, les allocations sont réduites (voir notre dossier sur l’injustifiable réforme), «et en même temps» les droits
sont censés être élargis à de nouveaux publics. Alors que les démissionnaires (et indépendants) ne se sont pas bousculés, 1,15million d’allocataires verront
leurs droits réduits la première année d’application de la réforme, selon l’Unédic.

(Source: Médiapart)

 

Le Medef veut bouleverser la gouvernance de l’assurance chômage

Le Medef vient de proposer un « big bang » de la gouvernance de l’assurance chômage, avec la création de « trois blocs », permettant de « revenir à un système où chacun a sa responsabilité », alors que le système actuel est « structurellement en déficit ».

La principale organisation patronale imagine d’articuler un « régime de solidarité géré et financé par l’Etat, un régime assuranciel géré et financé par les partenaires sociaux, et un service public de l’emploi géré et financé par l’Etat », a expliqué son président Geoffroy Roux de Bézieux, au cours d’une conférence de presse organisée par l’Ajis (Association des journalistes de l’information sociale).

Pour marquer cette évolution, le Medef propose de changer le nom de l’Unédic, qui deviendrait l’Agile (Association de gestion interprofessionnelle pour l’emploi).

Le régime actuel n’est plus réellement paritaire, puisque la négociation sur l’assurance chômage avec les partenaires sociaux a été « placée sous le contrôle effectif de l’Etat », que le régime dépend en partie de l’impôt, et que « de multiples décisions sont budgétairement supportées par le régime alors que ce sont des dépenses qui relèvent de la solidarité », souligne le Medef.

Il a « accumulé à date 54 milliards d’euros de dettes et a été paralysé par la place croissante de l’Etat », déplore-t-il.

Il s’agit donc de clarifier le rôle et les responsabilités financières de chacun. Privé de la garantie de l’Etat, le régime assuranciel se devrait d’être globalement à l’équilibre.

Aujourd’hui Pôle emploi est financé à 80% par l’assurance chômage, alors qu’il travaille aussi pour « les fins de CDD de la fonction publique, les primoaccédants sur le marché du travail ». « Il n’y aucune raison que le système assuranciel finance à 80% le service public de l’emploi », a estimé M. Roux de Bézieux.

Le patron du Medef a expliqué mettre cette proposition sur la table alors que doit s’ouvrir avec le gouvernement une concertation sur la gouvernance de l’assurance chômage.

« Il y a une élection en 2022 », a aussi rappelé M. Roux de Bézieux. « Le président de la République avait une vision de nationalisation du système (lors de sa campagne en 2017, NDLR). Mais on s’est arrêté en chemin (…) On verra s’il y a d’autres candidats que le sujet intéresse », a-t-il glissé.

Interrogé par l’AFP, le ministère du Travail a affirmé qu’une série de réunions bilatérales aurait lieu « courant mai » avec l’ensemble des organisations syndicales et patronales pour recueillir leur perception sur la gouvernance de l’assurance chômage.

La CGT a accueilli fraîchement la proposition jeudi. « C’est du réchauffé, ça a déjà été proposé à plusieurs reprises dans les négociations, aucun syndicat n’en voulait », a affirmé à l’AFP Denis Gravouil, négociateur assurance chômage de la centrale.

« C’était la base des négociations en 2016 et 2017 (…). Cela institue une assurance chômage à plusieurs vitesses, un filet de sécurité d’aide sociale qu’on ne financerait pas, une assurance chômage pour les classes moyennes, et puis un partage des tâches entre l’Etat et les organisations représentatives », a-t-il dénoncé.

(Sources: Challenges)