Le Compte personnel de formation (CPF) est victime de son succès. Après trois ans de gratuité et 5 millions de formations demandées, le salarié pourrait bien mettre la main à la poche. C’est ce que stipule un amendement inséré par le gouvernement, dans le projet de loi de finances de 2023.
Cet amendement déposé le 10 décembre par le gouvernement pour imposer aux salariés une participation financière à leur formation lorsqu’ils utilisent leur compte personnel de formation « est une erreur sociale et une erreur économique », s’est insurgé l’ancienne ministre du Travail Muriel Pénicaud.
Acquérir une compétence technique ou créative, se former tout au long de sa vie de professionnel, jusqu’ici, c’était gratuit, avec le Compte personnel de formation, le CPF. En deux clics, les salariés qui choisiront demain une formation, devront en régler une partie. C’est ce que prévoit un projet de loi. Pour Xavier Tatigney, cadre en formation, qui a choisi d’utiliser son CPF pour perfectionner son anglais, il faudra passer à la caisse. « Si demain, on me demande de payer pour rester employable, on marche sur la tête ».
« Qui dans les milieux modestes va pouvoir payer 50 ou 100 euros pour sa formation, sachant qu’ils font déjà l’effort de se former, souvent en dehors du temps de travail ?« . « Si vous commencez à payer pour votre propre employabilité, je pense qu’on marche sur la tête« , lance l’ancienne ministre du Travail. Elle considère que les employés français « ont gagné ce droit [de formation] par la loi de 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel ». « Ils l’ont gagné aussi en travaillant« , ajoute-t-elle. Muriel Pénicaud explique ainsi le rôle du compte personnel de formation : « Chaque année que vous travaillez, il y a une sorte de Livret A, le CPF, sur lequel la collectivité met 500 euros, ou 800 euros si vous êtes en situation de handicap« , précise l’ancienne ministre. « Sur les cinq millions de salariés qui sont formés, plus de 80% sont des ouvriers et employés, la moitié sont des femmes et 20% sont des personnes de plus de 50 ans« , affirme Muriel Pénicaud. Elle estime qu’il s’agit donc de « gens qui n’avaient pas accès à la formation avant, ou très rarement« . Face à ce constat, elle juge l’investissement dans l’éducation et la formation « utile à chacun et à la nation« . L’ancienne ministre assure qu’il « faut six générations en France pour passer de l’extrême pauvreté à la classe moyenne« . « La plus grande des inégalités est une inégalité des chances, d’éducation et de formation« .
Un reste à charge, dont le montant reste à déterminer et dont seraient exonérés les demandeurs d’emploi, mais aussi ceux dont la formation est validée par leur employeur. En près de trois ans, cinq millions de personnes se sont formées grâce au CPF. Un succès qui a un coût : 7 milliards d’euros au total. Faire payer les salariés, cela permettrait de faire baisser la facture.
C’est clairement l’objectif du gouvernement: faire des économies, encore et toujours…
(source: France Info)