Que sont devenus les indicateurs ICT1 et ICT1bis de la convention tripartite de 2012 ?

Selon la page 38 du rapport que viennent de produire conjointement l’Inspection Générale des Finances et l’Inspection Générale des Affaires Sociales en vue d’évaluer (les résultats de) la convention tripartite qui s’achève :

« De même, les indicateurs ICT 1 et 1bis portant sur les sorties vers l’emploi ne devraient pas être reconduits sous cette forme en raison de leur grande complexité. Ils rendent difficilement compte de la performance de l’opérateur. Ils sont très sophistiqués, ne permettent pas un suivi adapté et ne peuvent pas être des leviers de pilotage sur le terrain.

La mission considère cependant qu’il est important de construire un indicateur portant sur la mesure de la capacité de placement de Pôle emploi. Elle incite donc les signataires de la convention tripartite à redéfinir le périmètre et la méthodologie d’un tel indicateur afin de le simplifier, le rendre plus visible et permettre son utilisation dans le pilotage de l’opérateur, y compris sur le terrain. Sur ce point, les perspectives offertes par les déclarations préalables à l’embauche et la déclaration sociale nominative sont des éléments de contexte susceptibles de faciliter l’amélioration de ces indicateurs au cours de la prochaine convention. »

Assez curieusement, la mission n’insiste pas sur le fait que ces deux premiers indicateurs – dont la définition est visible ci-dessus – n’ont pas été déployés du tout sur le « terrain », ce qui est pourtant remarquable. Comme on peut le constater à la lecture du second paragraphe, un nouvel indicateur est préconisé, plus simple, plus visible et permettant son utilisation dans le pilotage « sur le terrain ». La référence aux DPAE montre la continuité dans la logique du calcul automatisé, mais la référence à la DSN et l’expression « sont des éléments de contexte susceptibles de faciliter » semblent indiquer que tout ne s’est pas passé comme prévu avec les DPAE. Si tel était le cas, ce serait un échec cuisant pour le directeur général. Mais restons prudents…

Dans la convention tripartite 2015-2018 l’indicateur numéro 1 (ICT1) est en effet beaucoup plus simple : « Nombre de retours à l’emploi » en cumul annuel sur l’année. La durée des contrats ne semble plus prise en compte. La quantité affichée pour 2014 (3.590.000) laisse penser que les DPAE concernant une même personne ne seraient comptabilisées qu’une fois. Ou alors qu’une durée minimale des contrats (2 mois ?) est fixée pour la prise en compte dans l’indicateur, mais dans ce cas pourquoi ne pas l’annoncer ?

Quoiqu’il en soit, la « comparaison des performances » au plus près du « terrain » sur des portefeuilles n’ayant pas une taille équivalente obligera les directions à utiliser des indicateurs en pourcentage et pas seulement un indicateur « valeur absolue ». Encore une fois ce sont les directions « au plus près du terrain » qui risquent de porter le chapeau d’une politique de classement des équipes et des conseillers.

Convention tripartite 2015-2018 : bien que discrète, la performance comparée est toujours là

Le bas de la page 33 et le haut de la page 34 de la nouvelle convention tripartite nous apprennent que la « performance comparée » est toujours d’actualité, même si l’échéance à fin 2015 peut laisser penser à un nouveau report. Rappelons que le classement mensuel des équipes et des conseillers, prévu pour début 2014, avait été repoussé à début 2015. Aurons-nous quelques mois de répit supplémentaires ?

Si on observe les indicateurs de la nouvelle convention, on pourrait croire que le « taux de sorties vers l’emploi durable » est jeté au rebut avant d’avoir servi. Le nouvel indicateur numéro un n’est plus le taux de sorties, mais le nombre de sorties vers l’emploi (peu importe la durée du contrat). L’indicateur numéro deux est le nombre de sorties « durables » (c’est à dire pour six mois ou plus).

Or si les « taux de sorties » permettent le classement mensuel des équipes et des conseillers, les « nombres de sorties » ne permettent pas les comparaisons (sauf entre des portefeuilles dont la taille est identique comme les portefeuilles d’accompagnement renforcé). Comment dans ces conditions mettre en place un dispositif généralisé de performance comparée ?

La solution est à la page 33 :

« Les indicateurs de suivi de la convention tripartite 2012-2014 non reconduits dans la présente convention comme indicateurs stratégiques continueront à être produits par Pôle Emploi en parallèle des nouveaux indicateurs afin d’éviter les ruptures de série et de permettre une analyse continue des données. »

L’indicateur numéro un de la convention qui s’achève ne disparaît donc pas. Il devient seulement plus discret. La prise de conscience grandissante des effets pervers de la mise en place du benchmarking à Pôle Emploi a probablement conduit le gouvernement et la direction à cette discrétion.

Dans chaque agence, mettons en débat les indicateurs de l’ancienne et de la nouvelle convention. Le classement mensuel par les taux de sorties vers l’emploi est l’outil qui permet la mise en concurrence à tous les niveaux, qui plus est sur un critère frelaté. Continuons à le combattre.

Déclaration CGT à l’ouverture du Comité d’Établissement du 18 décembre 2014

Aujourd’hui doit être présenté à l’Assemblée Nationale – selon la procédure accélérée – un projet de loi permettant à la France de ratifier la convention n° 181 de l’Organisation Internationale du Travail (OIT). Cette convention permet aux états signataires d’autoriser l’activité des agences d’emploi privées.

La comparaison des « performances » est maintenant possible en temps réel et à tous les niveaux. En effet, l’instrument de mesure des résultats – le calcul automatisé du taux de sorties vers l’emploi – est désormais en place, prêt à fonctionner.

C’est évidemment une très mauvaise nouvelle pour le service public de l’emploi.

Mais c’est aussi une très mauvaise nouvelle pour l’ensemble des salariés de notre pays. Le « taux de sorties vers l’emploi » est un critère purement quantitatif. Il ne tient pas compte de la qualité des emplois repris. La course à la quantité des « reprises d’activité » ne peut que mener à la dégradation de la qualité de l’accompagnement des privés d’emploi, à la précarisation croissante d’une part toujours plus importante des salariés.

Le rapport Boulanger, publié en 2008, annonçait « la structuration d’un marché d’acteurs performants [du reclassement] ».

Le classement mensuel ne concerne pas que les conseillers, les équipes, les agences Pôle Emploi. Il concerne aussi les futurs concurrents de Pôle Emploi. Bien plus, il était la condition de leur émergence. La concurrence est installée à tous les niveaux au service d’un seul objectif : contraindre de plus en plus les privés d’emploi à renoncer à toute exigence.

Depuis plus de deux ans, la CGT Pôle Emploi Lorraine explique sans relâche ce qui se prépare. C’est tellement énorme que bien peu y croyaient au début. Aujourd’hui les choses sont claires.

Il est encore temps de rassembler largement, bien au-delà des privés d’emploi et des agents de Pôle Emploi. Tou-te-s les salarié-e-s de notre pays sont concernés à des degrés divers. Tous ensemble, nous pouvons encore faire reculer ce projet.

Ratification de la convention OIT 181 autorisant les agences d’emploi privées

L’instrument de mesure des résultats – le calcul automatisé du taux de sorties vers l’emploi – est désormais en place, prêt à fonctionner.

La comparaison des « performances » est maintenant possible en temps réel et à tous les niveaux.

Le gouvernement vient d’annoncer que jeudi prochain 18 décembre sera présenté à l’Assemblée Nationale – selon la procédure accélérée – un projet de loi permettant à la France de ratifier la convention n° 181 de l’Organisation Internationale du Travail (OIT). Cette convention permet aux états signataires d’autoriser l’activité des agences d’emploi privées.

C’est évidemment une très mauvaise nouvelle pour le service public de l’emploi.

Mais c’est aussi une très mauvaise nouvelle pour l’ensemble des salariés de notre pays. Le « taux de sorties vers l’emploi » est un critère purement quantitatif. Il ne tient pas compte de la qualité des emplois repris. La course à la quantité des « reprises d’activité » ne peut que mener à la dégradation de la qualité de l’accompagnement des privés d’emploi, à la précarisation croissante d’une part toujours plus importante des salariés.

Le rapport Boulanger, publié en 2008, annonçait « la structuration d’un marché d’acteurs performants [du reclassement] ».

Le classement mensuel ne concerne pas que les conseillers, les équipes, les agences Pôle Emploi. Il concerne aussi les futurs concurrents de Pôle Emploi. Bien plus, il était la condition de leur émergence. La concurrence est installée à tous les niveaux au service d’un seul objectif : contraindre de plus en plus les privés d’emploi à renoncer à toute exigence.

Depuis plus de deux ans, la CGT Pôle Emploi Lorraine explique sans relâche ce qui se prépare. C’est tellement énorme que bien peu y croyaient au début. Aujourd’hui les choses sont claires.

Il est encore temps de rassembler largement, bien au-delà des privés d’emploi et des agents de Pôle Emploi. Tou-te-s les salarié-e-s de notre pays sont concernés à des degrés divers. Tous ensemble, nous pouvons encore faire reculer ce projet.

En pièce jointe, le projet de loi visant à permettre la ratification de la convention n° 181 de l’OIT.

pl1887.pdf

La sénatrice Évelyne Didier interroge le ministre du travail à propos du classement mensuel des conseillers

Question écrite n° 14116 de Mme Évelyne Didier (Meurthe-et-Moselle – CRC)

publiée dans le JO Sénat du 11/12/2014 – page 2738

téléchargement (9)

« Mme Évelyne Didier attire l’attention de M. le ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social sur la mise en place d’un classement mensuel des conseillers de Pôle emploi prévue pour début 2015, et son impact sur les demandeurs d’emploi et l’ensemble des salariés. En effet, il est question de classer mensuellement chaque agence et chaque conseiller de Pôle emploi en fonction du taux de sorties vers l’emploi des personnes qu’il est chargé de suivre. Or, cette mesure ne tient compte que de la quantité des contrats de six mois ou plus trouvés par les demandeurs d’emploi, et non de leur qualité et du marché local du travail. Les conseillers vont ainsi être obligés de contraindre les inscrits à prendre n’importe quel contrat de six mois ou plus, même peu rémunéré, très éloigné de leur domicile, correspondant ou non aux qualifications de l’intéressé. Cette mesure risque donc d’accélérer la précarisation des salariés en mettant la pression sur les chercheurs d’emploi pour les contraindre à abandonner toute exigence en termes de choix, de salaire ou encore de proximité. C’est pourquoi, elle lui demande si le Gouvernement compte revoir ce pilotage par les seuls résultats et, au contraire, apporter les moyens matériels et humains pour accompagner véritablement et individuellement chaque demandeur d’emploi. »

En attente de réponse du Ministère du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social

Nouvel ANI sur le Contrat de Sécurisation Professionnelle : danger pour le Service Public de l’Emploi !

L’article 21 de l’accord national interprofessionnel (ANI) du 31 mai 2011 devient l’article 22 dans le projet de nouvel accord.

Mais surtout les lignes suivantes ont été rajoutées à cet article :

« Tous les opérateurs, y compris Pôle Emploi, chargés de l’accompagnement des bénéficiaires du CSP sont rémunérés en fonction des résultats obtenus en matière de reclassement durable en emploi. S’agissant de Pôle Emploi, la rémunération aux résultats tient compte des contraintes liées à sa mission d’opérateur public de l’emploi.

Dans le cadre de la mise en œuvre du dispositif, Pôle Emploi veille à ce que les relations avec les opérateurs en charge du suivi soient facilités par un partage d’information optimisé (par exemple par la mise à disposition des opérateurs des déclaration préalable à l’embauche concernant les bénéficiaires dont ils ont la charge de l’accompagnement et du suivi). »

Rémunération aux résultats, reclassement « durable » (6 mois ou plus), transmission des déclarations préablables à l’embauche (DPAE), on retrouve dans ce projet de nouvel accord tous les ingrédients du classement mensuel des conseillers et plus largement de l’ensemble des « opérateurs », alias « performance comparée », alias « pilotage par les résultats ». Mise en concurrence à tous les étages, évaluation quantitative et non qualitative des « reclassements », passage d’une logique de service public de l’emploi à une logique de création d’un marché du reclassement.

Les quelques avancées qui pourraient être contenues dans d’autres articles du projet d’ANI ne peuvent en aucun cas compenser ce qui va dans le sens de la disparition complète du service public de l’emploi. Les conséquences de cette disparition seraient dramatiques pour l’ensemble des salariés de notre pays.