Une soixantaine de branches professionnelles testent le CDD multi-remplacement, qui permet d’embaucher un salarié pour plusieurs missions de remplacement au moyen d’un seul contrat. Un nouvel assouplissement en trompe-l’œil.
Le contrat de travail à durée indéterminée à plein temps et s’inscrivant dans une relation directe de subordination entre employeur et salarié est la norme de la relation de travail. Il confère d’importantes protections aux travailleurs, mais est aussi utile aux employeurs, qui peuvent s’appuyer sur une main-d’œuvre stable, mettre à profit et maintenir à leur service le talent de cette dernière, tout en exerçant leur autorité et autres prérogatives patronales pour diriger et organiser le travail de leurs salariés.
Pourquoi créer un contrat à durée déterminée (CDD) multi-remplacement ? Le CDD est un contrat de travail par lequel un employeur recrute un salarié pour une durée limitée, se démarque de l’« emploi typique » en ce qu’il engendre par essence une plus grande précarité du salarié. Les entreprises y recourent car il présente l’avantage de prendre fin sans formalité, par son seul terme ou la réalisation de son objet, tel le retour du salarié malade remplacé.
Le législateur français a fait du CDD un mode exceptionnel d’embauchage et en a subordonné drastiquement le recours à des cas précis, tout en limitant sa durée et ses possibilités de renouvellement. La comparaison internationale (Bernd Waas, Guus Heerma van Voss, Restatement of Labour Law in Europe vol II : Atypical Employment Relationships, Hart Publishing, 2020) montre que le formalisme qui accompagne ce type de contrat est important en droit français.
Original à plus d’un titre
La législation nationale est également de plus en plus complexe : le CDD est devenu un outil des politiques d’emploi. S’appuyant sur le postulat jamais vérifié qu’une législation contraignante est défavorable à l’emploi en particulier pour les personnes dont l’insertion dans le marché du travail est la plus difficile, les règles dérogatoires et les règles spéciales se sont multipliées : on a vu fleurir les CDD jeunes, les CDD seniors et celui réservé aux salariés agricoles âgés, les CDD de transition, les contrats d’insertion ou de réinsertion professionnelle, les CDD de mission, les CDD de travaux urgents nécessités par des mesures de sécurité, les emplois saisonniers, le contrat vendange, celui relatif aux emplois pour lesquels il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée, le CDD pour les sportifs professionnels, etc.
L’expérimentation du CDD multi-remplacement avait pris fin en 2020 : un seul CDD pour remplacer plusieurs personnes. Le dispositif reprend du service et le nombre de secteurs qui vont pouvoir y avoir recours est élargi.
Le dispositif du CDD multi-remplacement, ou CTT, contrat de travail temporaire, a été imaginé en 2019, dans le cadre de la loi « Avenir professionnel » et qui avait été enterré, faute de succès, fin 2020. Mais la crise sanitaire avait beaucoup pesé sur sa mise en œuvre et un décret, qui vient de paraître, lui redonne du service.
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Il ne s’agit pour l’instant que d’une expérimentation, lancée pour deux ans : on va pouvoir désormais faire signer un seul CDD à une personne qui pourra remplacer plusieurs salariés absents, à temps partiel, ou dont le contrat de travail est provisoirement suspendu. Concrètement, ce nouveau contrat permet de déroger à la règle sacro-sainte dans le droit du travail qui veut qu’un contrat de travail ne peut être conclu pour le remplacement que d’une seule personne. Au lieu de faire appel à plusieurs contrats courts pour remplacer différents salariés, le CDD multi-remplacement permet de n’utiliser qu’un seul contrat, forcément plus long. Tout bénéfice pour celui qui le signe.
Une utilisation précisément encadrée
La durée de ce nouveau type de CDD est limitée à 18 mois. Autre limite : il ne peut pas avoir pour objet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise. Il doit s’agir de répondre à un besoin ponctuel. Mais en revanche, rien n’empêche un employeur de demander à son CDD multitâches de travailler sur des sites différents, à condition, bien évidemment, qu’il puisse s’y rendre.
Le CDD multi-remplacement voit aussi son champ élargi : il avait été à l’origine pensé pour 11 secteurs d’activité, dont le domaine sanitaire, social et médico-social, dans lequel il avait eu un certain succès. On trouvait aussi l’industrie alimentaire et le transport routier. Son champ d’action est donc élargi. Il comprend désormais par exemple le commerce de détail non-alimentaire et les coopératives agricoles.
(Sources: Le Monde, France Info)