Le 29 janvier 2015, jour du conseil d’administration de l’UNEDIC et du comité national de liaison à Pôle emploi, plusieurs agences de Pôle emploi ont été occupées par des chômeurs et travailleurs précaires en colère, à l’appel de plusieurs organisations de la CGT.
La CGT exige que les effets désastreux de la convention assurance-chômage soient corrigés immédiatement. Celle-ci renforce la précarité, particulièrement pour les jeunes et les femmes, tous ceux qui sont touchés par une activité à temps partiel et par l’emploi discontinu. Des milliers d’entre eux sont bloqués par les nouvelles dispositions avec des indemnisations beaucoup plus faibles, voire même sans l’allocation dont ils auraient pu bénéficier avant la mise en place de la nouvelle convention.
Le nouveau système de droits rechargeables au chômage, grande nouveauté de la convention négociée début 2014, en place depuis octobre, pénalise des chômeurs ayant connu des carrières hachées avec de fortes variations de revenus.
Avant, pour calculer les droits d’un inscrit à Pôle emploi qui retravaillait, l’Unedic comparait les droits ouverts avant la reprise du travail et ceux recalculés après la reprise du travail et optait pour le meilleur « capital » de droits.
Maintenant, l’assurance chômage sert d’abord le premier capital puis le second. Du coup, nombre de chômeurs se retrouvent bloqués avec des droits misérables avant de pouvoir prétendre à de nouveaux droits.
L’Unedic reconnaît qu’un potentiel de 30 000 chômeurs pourrait être lésé par le nouveau dispositif. Pour ce calcul, elle ne compte que les allocataires disposant d’au moins 6 mois de reliquat de droits et ayant retravaillé au moins un an avec un salaire supérieur d’au moins 30 %. Le nombre d’allocataires véritablement lésé pourrait être par conséquent bien plus important.
Pour exemples d’effets pervers particulièrement scandaleux occasionnés par l’application de la nouvelle convention d’assurance chômage :
– l’exemple d’un musicien contraint d’épuiser ses droits (5 euros par jour pendant un an) avant de pouvoir bénéficier de nouveaux droits.
– une personne qui touche 600 € d’allocation chômage, puis reprend un travail payé 1 500 € et qui reperd son travail avant que ses anciens droits soient épuisés, ne touchera que 600 € par mois de l’Unédic au lieu de 1 100 € selon les anciennes règles, jusqu’à la fin de ses premiers droits.
– de nombreux autres témoignages ont été recueillis : L…, allocataire de Fort-de-France, touche 650 euros au lieu des 1050 euros attendus. J… allocataire de Dordogne, touche 500 euros au lieu des 940 euros attendus. C…, allocataire de Charente, touche 850 euros au lieu des 1380 attendus ; une allocataire qui touche 850 euros au lieu de 3600, une autre qui touche 195 euros au lieu de 900 ; une cadre gagnant 4.500 euros par mois avant de perdre son poste et qui se retrouve coincée avec 900 euros d’allocations quand elle en attendait 3.600 !
– les remontées de dossiers du terrain vers le bureau du médiateur de Pôle emploi sont légions.
Le sentiment d’injustice est tel, que les concernés se mobilisent de plus en plus, et les médias se sont emparés de cette situation scandaleuse.
Rappelons que dès les négociations sur la NCAC, la CGT n’a eu de cesse d’alerter sur les effets pervers des droits rechargeables dont l’existence et l’ampleur n’avaient pas été comprises par les organisations syndicales signataires.
Les gestionnaires de l’Unedic sont aujourd’hui embarrassés. Il est urgent d’agir dès maintenant, par avenant à la convention. Même Jean-François Pilliard du Medef concède qu’« on ne peut pas rester dans le statu quo ». C’est dire !
On se souvient de l’affaire des « recalculés » : en 2003, le durcissement des règles d’assurance-chômage avait progressivement privé de droits près de 300.000 chômeurs, obligeant l’Unédic – et l’Etat qui avait agréé la convention – à rebrousser chemin en 2004. Le scénario peut-il se répéter ?
Le 16 janvier, le bureau de l’Unedic a présenté les prévisions financières 2014-2015 et a pointé les effets pervers liés aux droits rechargeables. L’Unédic semble accepter de se pencher sur ce sujet jugé prioritaire. Plusieurs pistes de correction sont à l’étude. La première serait de généraliser le « droit d’option » accordé dès cet été aux apprentis (annexe XI de la convention Unédic), justement pour éviter le phénomène décrit ci-avant (ils moins payés comme apprentis que comme salariés ensuite) : en cas de réinscription au chômage, ils peuvent renoncer à leur ancien capital pour toucher de suite leurs nouveaux droits. Autre piste : remonter moins loin que trois ans pour définir les anciens droits non consommés.
La CGT exige des organisations patronales et syndicales signataires et du gouvernement un règlement du problème immédiat. Il est urgent de redéfinir une règle pour supprimer ces cas aberrants. La CGT milite pour obtenir le « droit d’option » entre reliquat de droits et nouveaux droits pour tous.
Pour la CGT les actions vont continuer jusqu’à l’obtention d’un régime d’assurance-chômage digne de ce nom, de droits sociaux à la hauteur des besoins et relevant d’une véritable sécurité sociale professionnelle.
Au-delà de ce scandale des droits rechargeables, il est urgent pour la CGT de revaloriser les salaires et d’avoir une autre politique pour l’emploi que les politiques d’austérité menant à la catastrophe.