ETUDES ET CHIFFRES CLES SUR LES RPS
Personne ne peut aujourd’hui ignorer les conséquences du stress professionnel sur la santé physique et mentale des salariés. Des faits divers dramatiques viennent quotidiennement nous rappeler que les risques psychosociaux constituent désormais une priorité en termes de prévention. Leurs coûts financiers sont plus rarement évoqués. Ils constituent pourtant un autre argument de poids plaidant en faveur d’un renforcement des mesures de prévention.
En 2007, l’INRS (Institut National de Recherche et de Sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles) en collaboration avec Arts et Métiers ParisTech a évalué le coût social du stress en France à 2 à 3 milliards d’euros. Les auteurs insistent sur le fait qu’il s’agit d’une évaluation a minima. Les chiffres réels sont vraisemblablement bien supérieurs, et ce pour deux raisons :
– Dans cette étude, la mesure du stress est inhérente au modèle de Karasek. Or le « job strain » -mesure du stress selon Karasek – ou « situation de travail tendue », ne représente qu’une partie des situations de travail fortement stressantes. Faute de données suffisamment établies, d’autres facteurs de stress importants comme le manque de soutien social ou le manque de reconnaissance n’ont pas pu être pris en compte.
– Parmi les pathologies liées au stress, ont été retenues les maladies cardiovasculaires (infarctus, maladies cérébrovasculaires, hypertension…), la dépression et certains troubles musculosquelettiques (TMS). Les maladies immunitaires, allergiques ou encore les désordres hormonaux sont en revanche exclus du champ de l’étude. Enfin, la dimension du coût pour l’individu, et en particulier la souffrance et la perte de bien-être que le stress occasionne, n’a pas pu être prise en compte.
De plus, selon les données de la CNAMTS/DRP, 107 décès par suicide ont fait l’objet d’une demande de reconnaissance au titre des accidents du travail au cours de la période janvier 2008- décembre 2009 dont 56 en 2009. Parmi les 107 suicides déclarés, 94 concernent des hommes (soit 88%) et 50 suicides déclarés (47%) concernent les professions intellectuelles supérieures et professions intermédiaires.
Etudes et sondages : de quelles études dispose-t-on ?
Le collège d’expertise sur le suivi statistique des RPS, mis en place à la suite du rapport
Nasse/Légeron, a rendu un rapport intermédiaire sur la question en octobre 2009. Retenant provisoirement six dimensions de RPS, le collège souligne que « pour pouvoir construire des indicateurs synthétiques pertinents, il faudrait disposer d’un modèle théorique de référence embrassant les différentes dimensions évoquées, et d’une source statistique permettant de valider empiriquement les regroupements d’indicateurs au sein d’une (sous-)dimension ou issus de plusieurs (sous-)dimensions ». Par conséquent, si les indicateurs existants présentent de nombreuses limites, il n’est pas aisé d’en construire de nouveaux. Le collège d’expertise propose une batterie d’indicateurs tirés de diverses enquêtes menées en France (détails ci-dessous). Ces indicateurs sont pertinents dans le cadre d’un suivi statistique et épidémiologique des RPS à l’échelle de la population française, mais ne sont pas forcément transposables et adaptés à un diagnostic en petite entreprise.
Parmi les enquêtes fournissant des données intéressantes sur l’exposition aux RPS en France, citons :
– L’enquête Conditions de Travail (ECT), lancée par la DARES en 1978, puis reconduite en 1984, 1991, 1998, 2005 et 2012. Si certaines dimensions des deux modèles de stress les plus répandus (Karasek et Siegrist) apparaissent de plus en plus présentes à chaque nouvelle vague, l’enquête ECT conserve une certaine distance vis-à-vis de ces modèles. Ils constituent une source d’inspiration, sans pour autant devenir une référence contraignante.
– L’enquête SIP (Santé et itinéraire professionnel), lancée fin 2006 et renouvelée en 2010, témoigne d’une prise en compte grandissante des RPS dans les enquêtes sur les conditions de travail. Pour chacun des emplois occupés par la personne enquêtée au cours de sa vie professionnelle, on retrouve de nombreuses modalités correspondant à des dimensions propres aux RPS.
– L’enquête SUMER est le seul outil statistique disponible en France qui fournit une mesure de l’exposition au stress professionnel basée sur un modèle de référence (le JCQ de Karasek en 2003). Les résultats de l’enquête ont permis de produire une mesure du « job strain » (mesure du stress selon le modèle de Karasek) pour une population représentative de la population salariée française. La nouvelle enquête SUMER 2009 présente une mesure plus complète des facteurs de RPS en intégrant la reconnaissance au travail (partie du questionnaire de Siegrist). Les premiers résultats sont attendus pour fin 2011.
Quels sont les résultats ?
D’après les résultats de l’enquête SUMER 2003, les femmes sont plus fréquemment exposées au job-strain (combinaison d’une faible latitude décisionnelle avec une demande psychologique élevée) que les hommes. Ce résultat est cohérent avec ceux d’autres études internationales.
Les différences entre les professions sont marquées, ces expositions suivant un fort gradient social (les cadres et les ingénieurs sont moins exposés que les employés ou les ouvriers). Par contre, les différences entre les secteurs d’activité apparaissent plus réduites, en particulier chez les femmes. Il n’existe pas d’études sur les différences d’exposition au stress entre les secteurs d’activités. Remarque : ces résultats sont basés sur le seul modèle de Karasek qui ne prend pas en compte tous les facteurs de RPS.
Pour plus d’informations, des statistiques sur les conditions de travail et la santé au travail sont disponibles sur le site de la Direction de l’animation et de la recherche des études statistiques (DARES). A titre indicatif, on y trouve notamment : les publications DARES sur les conditions de travail, les publications DARES sur la santé au travail, une première exploitation de l’Enquête SIP sur les liens existant entre parcours professionnels et état de santé.